Dans une déclaration audacieuse en juillet dernier, Elon Musk s’est adressé à X pour avertir les vendeurs à découvert de Tesla qu’ils seraient « écrasés » une fois que l’entreprise aurait pleinement atteint ses objectifs ambitieux de conduite autonome et de production en série de ses robots humanoïdes Optimus. La confiance du PDG de Tesla était inébranlable, prédisant que ceux qui pariaient contre le géant du véhicule électrique – y compris des sceptiques de renom comme Bill Gates – seraient ruinés financièrement. Mais en avril 2025, la situation s’est radicalement inversée. Loin d’être anéantis, les vendeurs à découvert ont empoché un bénéfice colossal de 16,2 milliards de dollars au cours des trois derniers mois, profitant d’une forte baisse du cours de l’action Tesla qui a laissé les investisseurs et les analystes sous le choc.

La manne des vendeurs à découvert intervient alors que la capitalisation boursière de Tesla a chuté de plus de 700 milliards de dollars depuis son pic de décembre 2024. L’action, autrefois chouchoute de Wall Street, a perdu plus de 50 % de sa valeur, s’échangeant autour de 225 dollars par action début avril. Cet effondrement a été une aubaine pour les fonds spéculatifs et les traders qui parient contre Tesla. Le cabinet d’analyse financière S3 Partners rapporte que les positions courtes ont généré des gains massifs depuis le début de la crise. Ce gain de 16,2 milliards de dollars marque un triomphe pour les investisseurs pessimistes de Tesla, qui ont subi des années de pertes – totalisant 64,5 milliards de dollars depuis l’introduction en bourse de l’entreprise en 2010 – alors que l’action a atteint des sommets vertigineux.
Alors, qu’est-ce qui a dérapé dans la prédiction d’Elon Musk ? Les difficultés de Tesla découlent d’une série de défis. Les faibles résultats du quatrième trimestre de janvier 2025 ont révélé une baisse de 41 % des ventes sur des marchés clés comme la France, tandis que la demande mondiale de véhicules électriques s’est ralentie. Son concurrent BYD, un constructeur automobile chinois, a bondi, dépassant Tesla en termes de chiffre d’affaires avec 107 milliards de dollars en 2024, contre 97,7 milliards de dollars pour Tesla, grâce à des innovations comme la technologie de recharge ultra-rapide. Parallèlement, les engagements politiques d’Elon Musk ont aliéné certains des principaux clients de Tesla. Son soutien explicite à l’administration de Donald Trump et son rôle controversé au sein du Département de l’efficacité gouvernementale (DOGE) ont suscité une vive réaction des consommateurs, des signalements d’actes de vandalisme dans les showrooms Tesla et des manifestations témoignant d’une érosion de l’image autrefois immaculée de la marque.
Malgré les revers, Musk reste déterminé. Tesla dispose toujours d’une réserve de trésorerie de 36,56 milliards de dollars et d’un flux de trésorerie positif, offrant une protection contre un effondrement immédiat. Musk continue de vanter le potentiel transformateur des technologies de conduite autonome et d’Optimus, insistant sur le fait que la vision à long terme de Tesla fera taire les sceptiques. Pourtant, pour l’instant, ce sont les vendeurs à découvert qui se moquent. Leur gain de 16,2 milliards de dollars souligne un faux pas rare pour un homme connu pour avoir défié les pronostics, des fusées réutilisables de SpaceX à la domination précoce de Tesla sur les véhicules électriques. Wall Street, elle aussi, suit la situation de près : JPMorgan a récemment abaissé son objectif de cours Tesla de 135 $ à 120 $, invoquant une atteinte sans précédent à la marque.
En avril 2025, la bataille entre Musk et les vendeurs à découvert est loin d’être terminée. Si ces derniers se réjouissent de leurs gains, la volatilité de Tesla laisse penser que cette saga pourrait encore basculer d’un côté comme de l’autre. Pour Musk, c’est un test de résilience ; pour les vendeurs à découvert, une victoire éphémère dans une guerre qui fait rage depuis plus de dix ans. Une chose est sûre : les enjeux n’ont jamais été aussi élevés.